Quand arrive la mécanisation

En 2025, les Zürcher Ziegeleien fêtent leurs 160 ans. C'est l'occasion idéale pour revenir sur le développement de l'entreprise. Dans la deuxième partie de notre série «Histoire de Zürcher Ziegeleien», nous allons nous pencher sur l'industrialisation des tuileries et briqueteries.

Dès le milieu du 19e siècle, c'en est fini du travail laborieux dans les briqueteries et tuileries. Grâce aux innovations techniques, l'industrialisation fait peu à peu disparaître les anciens fours à briques pour les remplacer par de grandes briqueteries et tuileries dites mécaniques et des fabriques de briques. La première briqueterie de cette nouvelle ère s'installe en 1850 à l'Albishof à Wiedikon. Dès 1866, elle va s'appeler Ziegelei Albishof AG. En 1892, l'entreprise construit une deuxième usine moderne dans le Giesshübel.

Ziegelei Albishof
Gravure de la tuilerie Albishof dans les années 1860.

En 1861, la «Mechanische Backsteinfabrik Zurich» voit le jour à Binz. Au début, il s'agit d'une société en nom collectif, qui devient une société anonyme en 1865. Ainsi est posée la première pierre des futures Zürcher Ziegeleien. En 1875, la société ouvre une deuxième usine performante au Tiergarten. L'usine s'approvisionne en matières premières dans la mine qui s'y trouve. Avec ses deux usines, la Mechanische Backsteinfabrik est alors considérée comme la plus grande tuilerie de Suisse.

Übersichtsplan Stadt Zürich
Aperçu des briqueteries mécaniques dans la ville de Zurich en 1907. De gauche à droite: briqueterie Giesshübel, briqueterie Albishof, fabrique de terre cuite Bodmer, fabrique mécanique de briques Binz, tuilerie Tiergarten et tuilerie à vapeur Heurieth.

En même temps, une nouvelle briqueterie mécanique est construite au Heuried. Elle passe aux mains de la toute nouvelle «Dampfziegelei Heurieth AG». La terre rouge nécessaire à la fabrication des tuiles à emboîtement provient de mines plus lointaines (Herdern, Sihlfeld); la briqueterie du Tiergarten est donc la première, dès 1899, à disposer de sa propre liaison ferroviaire. En 1871, c'est au tour de la fabrique Bodmer, spécialisée en céramique plus fine comme le terracotta, de voir le jour.

À Laufon, où se trouve l'un des sites de production actuels de Zürcher Ziegeleien AG, la première briqueterie moderne est créée à la fin du 19e siècle.  Le 4 juillet 1892, trois entrepreneurs créent la fabrique de Laufon, dans le Laufonnais autrefois bernois. Les activités se divisent en céramique lourde et céramique fine.

Dampfziegelei Heuried
Aperçu de la briqueterie à vapeur au Heuried après le changement de siècle.
Extrudeuse et four annulaire

En plus de l'extrudeuse qui débite un boudin continu et de forme précise d'argile, le four annulaire est la principale étape sur le chemin de la briqueterie artisanale à la briqueterie mécanique. Le four annulaire est composé d'un grand cercle de 12 à 24 chambres de combustion, qui sont alimentées séparément en combustible. Le feu circule sans interruption dans le sens du flux d'air dans le cercle de chambres de combustion. Il met une à deux semaines pour faire le tour des chambres et cuire les briques enfermées dedans à environ 1000 degrés Celsius. Ce four à combustion continue permet une exploitation plus judicieuse des combustibles et une qualité plus homogène des briques. La présence du chemin de fer permet quant à elle l'arrivée de grandes quantités de charbon de bois, sans lesquelles l'utilisation des grands fours de cuisson aurait été impossible.

Ringofen Mechanische Backsteinfabrik Binz
Le four circulaire de la Mechanische Backsteinfabrik au Binz.

Malgré l'arrivée des fabriques mécaniques, la brique ne joue pendant longtemps qu'un rôle mineur comme matériau de construction à Zurich. Elle ne s'impose sur ce marché qu'à partir de 1883 suite à l'Exposition nationale suisse. L'industrie de la céramique y est présente avec un pavillon réalisé en brique apparente. Un an après seulement, la construction du bâtiment de chimie de l'EPF de Zurich avec ce matériau commence. Il s'agit du premier édifice représentatif de ce genre construit à Zurich avec des briques apparentes.

Keramisches Gewerbe Pavillon
Pavillon de l'industrie céramique lors de l'Exposition nationale suisse
Chemiegebäude der ETH Zürich
Construction représentative en brique dans la ville de Zurich: le bâtiment de chimie de l'EPF.

Après la construction de cet édifice à forte visibilité, la brique devient un matériau très apprécié dans la construction. Au cours des trois décennies autour du changement de siècle, la brique devient l'un des matériaux de façade les plus appréciés de Zurich. À cette époque, jusqu'à cent bâtiments sont réalisés chaque année en briques apparentes. Aujourd'hui encore, le mode de construction de cette époque marque l'image de la ville de Zurich.

L'industrie de la construction, et plus particulièrement la production de briques, vit son apogée. Entre 1890 et 1896, les capacités de production de l'industrie suisse des briques augmentent de 60%, notamment aussi grâce aux progrès réalisés dans la rationalisation. La fièvre spéculatrice sur le marché de la construction s'arrête provisoirement en 1898. Les banques encadrent davantage les crédits, de nombreuses entreprises de construction s'effondrent. Les briqueteries zurichoises, qui sont alors très rentables, ne sont pas non plus épargnées par cette crise.

Sources utilisées:

- Zürcher Ziegeleien 1912 – 1962, document. Zürcher Ziegeleien, 1962
- Die Zürcher Ziegeleien gestern, heute, morgen. Zürcher Ziegeleien, 1987
- Loslassen und anpacken. Hundert Jahre Wandel und Innovation. Von den Zürcher Ziegeleien zur Conzzeta. Karl Lüönd, 2012
- Backsteinstadt Zürich, Der Sichtbackstein-Boom zwischen 1883 und 1914, Wilko Potgeter et Stefan M. Holzer, 2021
- Archives d'histoire de la construction de la ville de Zurich